Monde des Sourds
Sourd, monde des Sourds, culture sourde, … ?
Source : Umiker V. (2007), L’implant cochléaire : sa divergence est-elle toujours d’actualité ?
Genève, Institut d’études sociales.
La surdité :
Notion par laquelle les entendants abordent en général la question des sourds, c’est le regard de la société majoritaire sur ce qui « manque » aux Sourds : l’audition.
Schématiquement, surdité = déficience auditive (absence ou manque) = handicap de la communication orale = maladie = souffrance = soins, thérapie.
La surdité recouvre une réalité complexe, la surdité ne se voit pas. Le fait est que beaucoup de sourds vivent cachés et isolés, honteux de leur surdité. Aussi les statistiques concernant la population sourde, que ce soit en France, en Europe ou partout dans le monde sont difficiles à établir.
Les Sourds, le « monde des Sourds » :
Groupe linguistique et culturel qui pratique une langue des signes. Dans ce cas, « Sourd » désigne le locuteur de la langue signée, membre de la communauté des Sourds.
Aussi, il existe une difficulté à établir des statistiques, venant du mot « sourd » et du sens qu’on lui donne.
- Se place-t-on d’un point de vue audiologique ? Si oui est-ce que une personne atteinte de surdité légère ou moyenne sera ou non incluse dans les statistiques ? Est-ce que les personnes qui se considèrent comme « malentendantes » sont incluses dans les chiffres des personnes sourdes ? A partir de quelle perte auditive est-on sourd ?
- Se place-t-on d’un point de vue linguistique ? Si oui comment recenser toutes les personnes ayant une perte auditive et utilisant la langue des signes ?
Cependant on peut évaluer en France :
- à 8 % les Français qui ont un déficit auditif, soit près de 5 millions de personnes en France dont 3 millions avec une déficience auditive profonde ou totale.
- environ 200 000 personnes qui utilisent la Langue des Signes Française (LSF) en métropole
- la surdité congénitale touche un nouveau-né sur 1000, soit 700 enfants sourds qui naissent chaque année (selon l’OMS).
Source : Handicap auditif en France – Apports de l’enquête HID 1998-1999
Contexte, histoire
Bref rappel historique :
L’Abbé de l’Épée affirme la nécessité de la communication gestuelle avec les Sourds. En 1760, il ouvre la première école pour Sourds libre et gratuite en France. Dès lors, les instituts pour Sourds se développent un peu partout. Deux courants d’éducation des Sourds se rivalisent : les pro-oralistes et les pro-signes.
Contexte politique à la fin du 19e en Europe :
- Positivisme ou l’idée que la technique résout tout.
- C’est la période du colonialisme, qui va de pair avec un désir d’unité nationale, d’uniformisation. La minorité -linguistique- dérange.
- Influence de la religion chrétienne : le langage corporel est profane, impur.
Ce contexte de la fin du 19e siècle en France conduit irrémédiablement à un essor des idées oralistes.
En 1880, le Congrès de Milan conduit à une interdiction pure et simple de la langue des signes. Elle durera durant 100 ans. C’est une période de répression féroce de la langue des signes, et pourtant pendant laquelle ni le pari de l’intégration, ni celui de la normalisation n’a pas été gagné…
Dans les années 70, de retour des États-Unis où les choses ont continué d’avancer, des Sourds initient le mouvement du Réveil Sourd. Cela consiste notamment en une réappropriation de la langue des signes, de la culture et l’identité Sourde par les Sourds. C’est un mouvement idéologique et politique.
Plusieurs lois sur l’accessibilité depuis, mais peine à les voir appliquer.
- 1975 : Loi d’orientation en faveur des personnes handicapées. Elle rend obligatoire l’accès des personnes handicapées aux institutions ouvertes à l’ensemble de la population.
- 1991 : Loi facilitant le bilinguisme. Elle autorise et organise l’enseignement du français et de la langue des signes pour les personnes sourdes.
- 2005 : Loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. L’accessibilité devient généralisée pour tous les domaines de la vie sociale (éducation, emploi, cadre bâti, transports…). Par cette loi, la LSF devient officiellement reconnue et l’enseignement bilingue français/LSF devient un droit pour tout enfant sourd qui veut en bénéficier.
Dans les faits
Les Sourds luttent depuis 40 ans au sein d’associations ou de manière individuelle pour une vraie éducation des enfants sourds en LSF.
On observe quelques apparitions progressives de classes bilingues en France. Encore très peu.
On est encore loin d’une égalité entre les personnes sourdes et les personnes entendantes en ce qui concerne l’accès à la vie sociale et à la vie culturelle.
L’accès à l’audiovisuel et au cinéma :
Par cette loi 2005, échelonnées sur dix ans, sont rendus obligatoires :
- l’accès physique aux Établissements Recevant du Public (ERP) – dont les cinémas font partie-,
- l’installation d’une boucle magnétique (système d’amplification pour les personnes appareillées),
- le sous-titrage pour les chaînes de télévision les plus importantes.
En revanche, -sauf si quelqu’un me montre un texte stipulant le contraire-, pas d’obligation de sous-titrage ou d’audiodescription pour les œuvres de cinéma à l’aube 2015.
Extrait du Plan handicap auditif :
http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/Plan_en_faveur_des_personnes_sourdes_ou_malentendantes_-_10_02_2010.pdf
La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances,
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000809647&dateTexte=&categorieLien=id quant à elle, ne contient même pas le mot cinéma. Elle parle elle aussi seulement de sous-titrage pour les programmes de télévision.
J’en conclus donc :
Aujourd’hui, en France, chaque démarche allant dans le sens de l’accessibilité du cinéma est basée uniquement sur la prise de conscience de cette nécessité et la bonne volonté des structures fabriquant et diffusant du cinéma : les producteurs, réalisateurs, distributeurs de films, les salles de cinéma, les festivals de cinéma…
On fait passer le mot ?